Le numérique face aux enjeux climatiques
A l’approche de l’été, l’inquiétude grandit après des épisodes inédits de sécheresse hivernale. Plus de 40 départements sont actuellement en restriction d’eau, pour cause de nappes phréatiques très déficitaires.
Les canicules et méga-incendies de l’été dernier en France ou plus récemment au Canada nous rappellent la réalité du dérèglement climatique.
Mieux comprendre les impacts du numérique
Les experts du GIEC soulignent la nécessité de changements structurels de grande ampleur dans tous les pans de l’économie. Qu’en est-il du secteur du numérique ? Comment agir sur les bons leviers ?
Des effets positifs…
Rappelons tout d’abord que certaines applications du numérique contribuent à réduire les émissions de gaz à effet de serre, notamment en limitant le nombre de déplacements inutiles grâce au télétravail ou à la maintenance à distance par exemple. Les objets connectés, alliés à la big data et à l’IA favorisent une gestion optimisée du chauffage, de la climatisation ou de l’éclairage, en détectant les fuites ou les surconsommations.
Mais un impact non négligeable
Toutefois, selon une étude parue dans la revue Patterns[1], le numérique génèrerait 2,1% à 3,9 % des émissions mondiales de CO2. Selon certaines études, l’’impact du numérique en France pourrait augmenter de 60% d’ici à 2040 et représenter jusqu’à 6,7 % des émissions de GES nationales.
Au-delà du CO2 et des gaz à effet de serre en général, il ne faut pas oublier de mesurer la consommation d’eau (ressource de plus en plus critique), sa pollution, ainsi que l’utilisation d’autres ressources naturelles non renouvelables, dites abiotiques, comme les minerais ou les terres rares par exemple.
[1] The real climate and transformative impact of ICT: A critique of estimates, trends, and regulations: Patterns (cell.com)
Où prioriser les actions ?
Le tableau récapitulatif ci-dessous permet de visualiser où se situent les impacts les plus importants : au niveau des terminaux des utilisateurs, et en particulier de leur fabrication.
Pour réduire l’empreinte carbone du numérique, le levier le plus efficace est l’augmentation de la durée de vie des terminaux. Cela implique de veiller à l’entretien, à la réparabilité de ceux-ci, mais aussi de travailler sur des solutions logicielles, des sites et des applis moins « gourmandes » afin de ne pas obliger les usagers à changer d’appareil trop fréquemment.
L’éco-conception en question
Évaluer la performance environnementale d’un site web
Concernant le volet technique, plusieurs outils existent afin d’évaluer la performance environnementale d’un site web. Ces outils de test permettent d’obtenir des métriques et des notes sur la qualité globale et la consommation énergétique d’un site. La presse a largement relayé ces dernières semaines le dispositif gratuit du collectif GreenIT, conçu sur le modèle du Nutriscore afin d’obtenir un affichage clair et lisible pour tous.
D’autres métriques existent et sont détaillés sur le site : larochelle-zerocarbone.fr/un-site-eco-responsable
Au-delà de la simple optimisation technique
Attention toutefois, comme le souligne Pierre Gasté, Directeur des opérations d’Alphalia , « l’engagement pour un numérique responsable n’est pas un affichage mais bien une démarche générale de l’organisation ». Autrement dit, la conception responsable va bien au-delà de la simple optimisation technique. Il s’agit d’interroger en amont le bien-fondé de la solution numérique (3U – Utile, Utilisable, Utilisé) et les fonctionnalités d’un service et des usages qu’il va entraîner.
Benoit Vinceneux qui accompagne des entreprises dans l’écoconception de sites et services en ligne, confirme : « Le fait d’agir dès la conception, en allégeant les produits, permet de gagner en efficacité mais aussi d’éviter la course au dernier modèle de smartphone. Sachant qu’en moyenne, seulement 20% des fonctionnalité dans une appli sont réellement utilisées ».
L’éco-conception numérique n’est donc pas seulement l’affaire des développeurs, mais de l’ensemble de la chaine décisionnelle.
En route vers la sobriété numérique
La Ville et l’Agglo de La Rochelle s’engagent
Dès 2019, la Ville et l’Agglo de La Rochelle ont été les premières collectivités territoriales à signer la « Charte Numérique responsable », s’engageant dans une démarche globale vers un numérique responsable, éthique et inclusif.
Concernant le volet climatique, Jérôme Valais, chef de projet numérique Ville et Agglo de La Rochelle, explique : « Un bilan carbone[1] a été réalisé en 2021, incluant les services informatiques et d’information des collectivités, et leurs prestataires externes, ainsi que les écoles de La Rochelle. Ce bilan nous a permis de nous comparer à d’autres collectivités territoriales et de concevoir notre feuille de route à partir d’éléments sûrs et complets ».
Un gros travail a été effectué concernant sur les achats, via de nouveaux contrats cadres afin de garantir des équipements labellisés, plus sobres et réparables pour un allongement de la durée de vie. La réutilisation de certains matériels est favorisée via des dons aux communes ou à des associations.
L’autre axe important pour la collectivité est de faciliter la diffusion des bonnes pratiques : « Nous souhaitons être exemplaires en interne et être force de proposition auprès des acteurs du territoire » résume Jérôme Valais.
[1] https://www.agglo-larochelle.fr/vie-pratique/numerique?article=numerique-responsable
Bon à savoir avant d’acheter un nouveau terminal : l’Agglo met à disposition un annuaire des acteurs de la réparation, reconditionnement, réemploi et recyclage de la filière numérique : Acteurs d’une seconde vie pour le matériel numérique – Agglo La Rochelle (agglo-larochelle.fr)
Sensibiliser les usagers aux bonnes pratiques
Nous sommes nombreux à avoir supprimé nos fichiers informatiques et mails inutiles stockés sur les ordinateurs et les serveurs, suite aux rappels du Digital CleanUp Day, relayé par la ville de La Rochelle et par l’Agglo. De plus, lors de la dernière édition, des diagnostics gratuits sur les dysfonctionnements éventuels des équipements personnels (ordinateurs, smartphones et tablettes) ont été proposés par les collectivités afin de favoriser la réparation.
Des boîtes de collecte pour smartphones usagés ont été installées dans les mairies de proximité et dans 14 communes.
Enfin, les participants ont été incités à aller plus loin, en suivant le MOOC en ligne de sensibilisation au Numérique Responsable (https://www.academie-nr.org/).
Prendre soin de son matériel est également un écogeste à encourager. Selon l’Ademe, 40% des pannes peuvent être évitées quand un smartphone est bien entretenu et bien protégé (coque et verre de protection notamment).
Enfin, signalons l’entreprise rochelaise easy.green et ses solutions permettant de supprimer jusqu’à 80% des émissions de CO2e générées par les pièces jointes des emails.
Hélène Buisson – hbsolutionscomm.com
Focus sur la plateforme de données Terreze
pour un territoire zéro carbone
Le projet Terreze comprend une infrastructure de gestion des données du territoire et un portail web pour les exploiter. La version prototype de Terreze présente deux premiers cas d’usage : les données énergétiques des bâtiments des collectivités locales et un tableau de bord pour le pilotage du projet par des indicateurs.
Objectif : aider tous les acteurs à construire la trajectoire pour atteindre l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2040.
En effet, le partage et la mise en circulation des données des acteurs du territoire permettra aux administrations, aux entreprises privées, aux associations et aux chercheurs d’accéder facilement à une grande diversité de données afin de produire des services performants, respectueux de la vie privée et de l’intérêt général.